Le Conseil constitutionnel a été saisi le 6 février 2014 par le Conseil d'État (décision n° 371236 du 5 février 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par le syndicat national des médecins biologistes, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 6211-3 du code de la santé publique.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;
Vu les observations produites pour le syndicat requérant par la SCP Barthélemy-Matuchansky-Vexliard, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées les 24 février et 11 mars 2014 ;
Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 28 février 2014 ;
Vu les pièces produites et jointes au dossier ;
Me Jean Barthélemy pour le syndicat requérant, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 25 mars 2014 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 6211-3 du code de la santé publique : « Ne constituent pas un examen de biologie médicale un test, un recueil et un traitement de signaux biologiques, à visée de dépistage, d'orientation diagnostique ou d'adaptation thérapeutique immédiate.
« Un arrêté du ministre chargé de la santé établit la liste de ces tests, recueils et traitements de signaux biologiques, après avis de la commission mentionnée à l'article L. 6213-12 et du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Cet arrêté détermine les catégories de personnes pouvant réaliser ces tests, recueils et traitements de signaux biologiques, ainsi que, le cas échéant, leurs conditions de réalisation » ;
2. Considérant que, selon le syndicat requérant, en renvoyant à un arrêté le soin de fixer la liste de ces tests, recueils et traitements de signaux biologiques et de déterminer tant les catégories de personnes pouvant les réaliser que, le cas échéant, les conditions de leur réalisation, le législateur a reporté sur le pouvoir réglementaire la détermination des règles relevant de la loi dans des conditions qui affectent le droit à la protection de la santé ; qu'il aurait ainsi méconnu l'étendue de sa compétence ;
3. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 61-1 de la Constitution : « Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé » ; que la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ne peut être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité que dans le cas où cette méconnaissance affecte par elle-même un droit ou une liberté que la Constitution garantit ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 6211-1 du code de la santé publique, « un examen de biologie médicale est un acte médical qui concourt à la prévention, au dépistage, au diagnostic ou à l'évaluation du risque de survenue d'états pathologiques, à la décision et à la prise en charge thérapeutiques, à la détermination ou au suivi de l'état physiologique ou physiopathologique de l'être humain, hormis les actes d'anatomie et de cytologie pathologiques, exécutés par des médecins spécialistes dans ce domaine » ; que l'article L. 6211-2 définit les « phases » de cet examen ; que les articles L. 6211-7 et suivants sont relatifs aux conditions et modalités de réalisation des examens de biologie médicale ;
5. Considérant que le législateur a défini les examens de biologie médicale, délimité leur champ d'application et encadré les conditions et modalités de leur réalisation ; qu'en excluant de cette définition les tests, recueils et traitements de signaux biologiques qui constituent des éléments de « dépistage, d'orientation diagnostique ou d'adaptation thérapeutique immédiate » et en renvoyant à un arrêté le soin d'établir la liste de ces tests, recueils et traitements de signaux biologiques et de déterminer les catégories de personnes pouvant les réaliser, ainsi que, le cas échéant, les conditions de leur réalisation, l'article L. 6211-3 n'a pas habilité le pouvoir règlementaire à adopter des dispositions qui mettent en cause des règles ou des principes fondamentaux que la Constitution place dans le domaine de la loi ; que, par suite, le grief tiré de ce que le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence doit en tout état de cause être écarté ;
6. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont contraires à aucun droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution,
D É C I D E :
Article 1er.- L'article L. 6211-3 du code de la santé publique est conforme à la Constitution.
Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 3 avril 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC et Mme Nicole MAESTRACCI.
Rendu public le 4 avril 2014.